mercredi 19 mars 2008

COLOMBIE-ÉQUATEUR • Mille excuses, monsieur le Ministre !

Revue de presse du Courrier International - 18 mars 2008

Le principal quotidien colombien s'est excusé d'avoir publié une photo montrant prétendument Gustavo Larrea, le ministre de la Sécurité équatorien, en compagnie de Raúl Reyes, numéro deux des FARC, tué le 1er mars. Bogotá comptait pourtant se servir de cette "preuve"...

Gustavo Larrea montre la photo publiée dans El Tiempo lors d'une conférence de presse à Quito
17 mars 2008, AFP


Le quotidien El Tiempo s'est "excusé" platement dans son édition du 18 mars, auprès de ses lecteurs et du ministre de la Sécurité équatorien, Gustavo Larrea, "regrettant" la publication dimanche 16 mars d'une photo qui, affirmait le journal, montrait Larrea en grande conversation avec Raúl Reyes, le numéro 2 des FARC tué par l'armée colombienne le 1er mars dernier.

Las ! "Le personnage de la photo n'était pas Larrea mais un dirigeant communiste argentin", avoue le journal, qui raconte que ce cliché et la légende l'accompagnant lui avaient été remis par "un fonctionnaire de la police nationale colombienne".

Le scandale n'est pas anodin, car il intervient en pleine crise diplomatique après l'incursion militaire colombienne du 1er mars contre un campement des FARC en territoire équatorien, qui s'était soldée par la mort d'une vingtaine de guérilleros – dont le numéro deux des FARC, Reyes, et cinq étudiants mexicains. Or, pour se défendre d'avoir "violé" le territoire équatorien, la Colombie invoque la légitime défense et accuse l'Equateur d'abriter les guérilleros des FARC.

La photo tombait donc à pic. Tellement à pic qu'un membre de la délégation colombienne qui assistait lundi 17 mars à la réunion à Washington de l'Organisation des Etats d'Amérique (OEA) consacré à cette crise l'a fait circuler, rapporte le quotidien équatorien El Comercio. La photo a eu "son effet", poursuit le journal équatorien, et est devenue "le centre de l'intérêt de la presse qui couvrait la réunion". El Tiempo en a même remis une couche sur son site Internet en titrant que "la photo publiée par notre journal est au cœur des débats".

A Washington, un journaliste équatorien a cependant émis des doutes sur l'identité de la personne qui apparaissait sur la photo. "Il est trop athlétique et possède beaucoup trop de cheveux pour être Larrea", a-t-il affirmé. L'ambassadeur de l'Equateur à l'OEA s'est indigné, puis des diplomates argentins ont reconnu l'acolyte de Reyes : Patricio Echegaray, secrétaire général du Parti communiste argentin.

El Comercio a joint l'intéressé à Buenos Aires qui, ravi d'avoir "été promu ministre", raconte qu'il a effectivement rencontré Raúl Reyes plusieurs fois, mais toujours en territoire colombien. La photo date de 2005 et avait été publiée par la presse argentine.

La controverse n'est pas terminée pour autant. L'Equateur se défend des accusations colombiennes en affirmant avoir démantelé plus de 100 bases des FARC sur son territoire. Depuis le 1er mars, la presse colombienne a publié plusieurs documents trouvés dans l'ordinateur de Raúl Reyes qui étaient la thèse du gouvernement colombien sur les liens de l'Equateur et du Venezuela avec les FARC. La photo publié par El Tiempo avait d'ailleurs été présentée comme provenant de cet ordinateur. Interpol a été appelé à la rescousse pour inspecter les trois ordinateurs saisis dans le camp des FARC et authentifier ces documents. L'enquête est en cours...


A.P.

Aucun commentaire: