samedi 27 octobre 2007

Un allié de Chávez sur le point de conquérir le pouvoir

hebdo n° 832 - 12 oct. 2006


ÉQUATEUR

A quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle du 15 octobre, le candidat de gauche Rafael Correa, un universitaire de 43 ans, est désormais le grand favori. Une perspective qui n’est pas du goût de Washington.


Si la tendance se confirme, le nouveau président de l’Equateur sera vraisemblablement un allié du Vénézuélien Hugo Chávez. C’est du moins ce qu’annonçaient les sondages publiés fin septembre, selon lesquels le candidat de gauche Rafael Correa récolterait 44 % des voix. Le conservateur León Roldós arrive en deuxième position, avec 39 % d’intentions de vote. Les bons rapports de Rafael Correa avec le président du Venezuela ne sont un secret pour personne. Au début de la campagne électorale, le candidat s’était d’ailleurs rendu à Caracas pour rencontrer Chávez. Après que ce dernier eut qualifié George Bush de “diable” devant les Nations unies, les journalistes se sont empressés de demander à Correa ce qu’il en pensait. “Le diable est peut-être maléfique, mais au moins il est intelligent. Bush est un président extrêmement maladroit, qui a fait beaucoup de mal à son pays et au monde”, a-t-il répondu. Le candidat de gauche, un universitaire âgé de 43 ans, n’a rien d’un imbécile. Rafael Correa, qui se décrit comme un “chrétien de gauche mais pas un marxiste”, a vu sa popularité progresser de façon spectaculaire, tandis que la candidate sociale-chrétienne, Cynthia Viteri, dégringolait dans les sondages et que León Roldós et le magnat de la banane Alvaro Noboa stagnaient.


Il y a huit mois encore, Correa se plaçait avec difficulté troisième dans les sondages, avec seulement 5 % d’opinions favorables – un classement qui ne l’empêchait pas d’être très respecté car son passage au ministère de l’Economie, sous la présidence d’Alfredo Palacio, lui a valu une excellente image. A tel point que sa cote de popularité atteignait les 57 %, au moment où celle de Palacio n’était que de 38 %. “Les raisons de son succès sont au nombre de trois”, affirme Mariela Ceballos, journaliste politique à l’Universo de Guayaquil, le journal le plus lu en Equateur. “Primo, la grande créativité de sa campagne. Secundo, le charisme du candidat. Tertio, le fait qu’il dise aux gens ce qu’ils ont envie d’entendre : le Congrès et les députés, dehors. S’il est élu, Rafael Correa a promis qu’il convoquerait une Assemblée constituante pour modifier le pouvoir législatif et mettre en place un nouveau Congrès”, ajoute la journaliste. Il est fort probable que Correa ne soit pas du goût de Washington. Le fait qu’il soit nationaliste, qu’il soit favorable à une alliance avec l’Argentine, le Venezuela et la Bolivie, et qu’il ait affirmé sa détermination de ne pas signer d’accord de libre-échange avec les Etats-Unis, rien de tout cela n’est pour plaire aux Etats-Unis. Et, depuis qu’il s’est prononcé en faveur d’un moratoire sur le paiement de la dette extérieure, il n’est pas non plus dans les petits papiers des organismes de crédit internationaux.


Dans cette campagne, les sondages restent néanmoins sujets à caution. Les directeurs des grands instituts sont en effet tous des proches de responsables politiques. Blasco Peñaherra, de l’institut Markett, a participé au mouvement qui a renversé l’ancien président Lucio Gutiérrez. Augusto Bernal, de Consultar, reconnaît que sa société a signé des contrats avec le candidat Alvaro Noboa. Chez Cedatos, Polibio Córdova est un ancien conseiller de Lucio Gutiérrez. Quant à Jaime Durán, d’Informe Confidencial, il a entretenu des rapports avec Jamil Mahuad. Résultat des courses : personne ne sait plus qui croire. Une chose est cependant certaine : l’Equateur a connu pas moins de cinq présidents (Abdalá Bucaram, Jamil Mahuad, Gustavo Noboa, Lucio Gutiérrez et Alfredo Palacio) en dix ans, et le pire serait que le prochain finisse comme ses prédécesseurs [presque tous ont eu des démêlés avec la justice]. Les 14 millions d’Equatoriens ne méritent pas tant d’instabilité.

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